Il a connu huit clubs dans trois pays avec plus 400 matches en carrière professionnelle avec un statut d’international béninois à la clé. De sa Côte d’ivoire natale en Afrique du Sud en passant par la Guinée Equatoriale pendant son parcours, il a presque tout vécu. Du centre de formation de Palma Lions Club à Abidjan jusqu’à l’élite dans un l’un des championnats les huppés du Continent à Black Leopards, il a eu une carrière remplie. International béninois depuis 2016, Christophe Aifimi (34 ans) aka Molto a fait le tour. Gardien puissant et agile, il a été au bout de ses rêves d’adolescent en faisant de sa passion son métier pendant dix-sept ans. Le portier qui vient d’annoncer sa retraite nous a fait ses premières confidences post-carrière. Entretien.
Vous avez annoncé récemment votre fin de carrière, cette décision vient d’où ?
En réalité, j’ai été contraint de stopper à cause de certaines douleurs qui m’empêchaient de m’entraîner normalement. J’avais mal au dos et au genou gauche. Cela a été très difficile mais je devais penser à moi. Je ne manquais pas pour autant d’opportunités, j’aurai pu signer à l’Asec Mimosas où je me suis soigné à Sol Béni pendant ma convalescence mais j’ai préféré écouté mon corps.
Ce qu’on a envie de vous demander, c’est quoi la suite après les gants et le terrain ?
Je veux me consacrer au coaching et la formation des gardiens de but. Puisque c’est un domaine que je maîtrise.
Revenons d’abord sur votre carrière, du Stella Club d’Adjamé au Black Leopards en première division sud-africaine, c’était riche…
J’ai été formé au Palma Lions Club où on a été champion national des U17. Ensuite j’ai joué deux années Williamsville Athlétique Club en troisième division ivoirienne avant de signer au Stella Club d’Adjamé en première division. J’ai connu deux finales de coupes nationales dont une gagnée en 2012 et l’autre perdu en 2013. Puis je me suis engagé avec l’As Tanda où j’ai été champion de Côte d’ivoire deux saisons d’affilée 2015 et 2016. Après je pars en Afrique du Sud. Durban FC pour une pige de six mois c’est de là que j’ai signé au Black Léopards en deuxième division en 2017. Nous avons réussi une montée en première division dès ma première saison. J’ai bien débuté avant d’être freiné par une blessure au dos qui a précipité la fin de mon aventure. J’ai rebondi au Futuro Kings en Guinée Equatoriale pour une dernière aventure à l’étranger. Avant de boucler avec un retour au Stella Club en 2020 avant de tout arrêter. J’ai gagné tous les titres possibles en Côte d’ivoire, je pense que c’est quelque chose de fort aussi dans ma carrière.
On ne peut évoquer votre parcours sans parler de ce titre à l’As Tanda ou encore la montée avec Black Leopards, qu’est ce qui a été le plus fort en émotions ?
Ma première année en 2015 à l’As Tanda était juste magnifique car j’ai établi un bon record de 17 clean sheet et 7 buts encaissés sur 24 match joués. J’ai fini meilleur gardien du championnat et meilleur joueur de mon équipe aussi avec distinction nationale. C’était très fort. Je voulais finir champion avec le Stella mais ça n’a jamais marché. Par contre la montée en première division sud-africaine était aussi pleine d’émotions. C’était fort mais je dirai que mon premier titre de champion était encore plus fort.
« En fin de saison en 2016 que j’ai reçu un appel d’Oumar Tchomogo qui était le sélectionneur national du Bénin qui voulait me sélectionner pour un match amical au Congo Brazzaville. Je n’ai pas réfléchi. »
D’autres souvenirs qui vous ont marqué durant votre carrière ?
Evidemment ma première convocation en équipe nationale du Bénin, avec le coach Oumar Tchomogo. A titre personnel, mon titre de meilleur gardien du championnat ivoirien en 2015. Le sacre en coupe nationale. Les trophées personnelles remportées qui font plaisir comme les Bjfoot Awards du meilleur gardien et meilleur joueur évoluant en Afrique en 2016. Je dirai aussi mon premier match en première division sud-africaine surtout après le décès de mon père…
Malgré que vous ayez grandi en Côte d’ivoire vous avez joué avec le Bénin, racontez-nous comment vous avez rejoint les Ecureuils à l’époque ?
Je suis né à Abidjan comme mes autres frères et sœurs. J’ai appris le foot ici. J’ai été plusieurs fois présélectionné avec chez les jeunes avec la Côte d’ivoire. Puis quand j’ai commencé à être vu en première division, la presse a commencé a relayé mes performances. Il y avait un journaliste béninois, Jacob Djossou qui était votre correspondant à Abidjan qui était venu me voir qui avait réalisé un sujet sur moi pour votre site à l’époque. Je pense que c’est ce qui m’a fait connaître au Bénin. Ça fait presque dix ans maintenant mais ça compte pour moi. J’étais encore un jeune gardien inconnu et cela m’a vraiment touché. En fin de saison en 2016 que j’ai reçu un appel d’Oumar Tchomogo qui était le sélectionneur national du Bénin qui voulait me sélectionner pour un match amical au Congo Brazzaville. Je n’ai pas réfléchi. J’ai accepté tout de suite. J’étais vraiment ému. Représenter mon pays d’origine était la meilleure des choses pour moi et ma famille. J’ai vécu de belles choses. On a manqué de peu la qualification à la Can 2017 à Bamako. J’avais le coeur brisé. J’ai eu aussi la chance de disputer le tournoi de l’UEMOA à Lomé avec le coach Mathias Déguénon. C’était de bons moments avec les coéquipiers de la sélection nationale. Je profite de cette tribune pour rendre hommage à Wilfried Ayédon, décédé cette année, qui m’a beaucoup aidé quand je venais au Bénin. Un homme de coeur.
« Maintenant les coaches recherchent des gardiens avec un très bon jeu au pied pour ressortir le ballon de derrière. »
Au soir de votre carrière comment jugez-vous le poste de gardien de but aujourd’hui ?
Le rôle du Gardien de but n’a pas changé, juste qu’il y a des apports dans le style de jeu. Maintenant les coaches recherchent des gardiens avec un très bon jeu au pied pour ressortir le ballon de derrière. Je constate que les gardiens maintenant veulent se comporter aux joueurs de champ en oubliant parfois leur rôle de base qui est d’arrêter les ballons. Le jeu au pied du gardien doit lui faciliter les sorties de balle, de bonnes relances. Mais, il faut éviter de prendre des risques et se mettre en danger. On a eu des grands gardiens avec un jeu au pied moyen mais qui se sont fait respecter à une certaine époque. Mais le poste a évolué maintenant.
Vous venez de décrocher une licence B de la Caf, vous êtes d’ailleurs le seul béninois titulaire de ce parchemin, des ambitions dans le coaching désormais ?
Je veux continuer dans le foot mais tout en restant dans mon domaine des gardiens de buts. Pour cela j’ai besoin de me former car l’expérience du joueur seule ne suffit pas. C’est déjà une première étape pour moi d’avoir obtenu la licence B de la Caf pour les entraîneurs de gardien de but. Mes ambitions sont nombreuses. Entraîner, former les jeunes. Mon véritable but c’est d’avoir tous les diplômes possibles mais le chemin est encore long. Car j’ai besoin aussi de bosser en club au quotidien en fonction des opportunités en Afrique ou ailleurs. Je veux pouvoir transmettre et faire progresser les jeunes gardiens.
Quels étaient vos modèles quand vous étiez en activité ?
Je m’inspirais de tous les bons gardiens de mon époque. Mais mon idole était Didier Drogba.
Si vous deviez donné un conseil à un jeune gardien aujourd’hui ?
Il faut d’abord aimer son poste, accepter les critiques, rester humble et respectueux, travailler sans relâche, éviter trop distractions. Et le plus important toujours croire en soi.
Entretien réalisé par Géraud Viwami à Abidjan (Côte d’ivoire)