Nommé à la tête du Bénin comme sélectionneur en février 2023, Gernot Rohr recruté pour trois ans vient de passer sa première année à la tête des Guépards. L’heure de dresser un premier bilan loin d’être tranquille pour le technicien français qui n’a toujours pas gagné avec la sélection béninoise.
Un bilan comptable inquiétant
Aucune victoire en huit matches officiels dirigés par Rohr. Gros point noir. Le technicien attend toujours sa première victoire avec le Bénin, aucun sélectionneur sur les vingt dernières années n’a mis autant de temps pour signer un premier succès. La victoire obtenue sur tapis vert face au Rwanda n’est pas comptabilisée comme acquise sur le terrain. Le match s’était soldé par un nul 1-1 à Kigali avant la décision de la Caf en faveur du Bénin. En ayant dirigé les quatre dernières journées des qualifications de la Can 2023, l’ancien niçois a échoué lors de l’ultime journée face au Mozambique en s’inclinant 3-2 à Maputo. Un premier échec qui n’est pas passé inaperçu. Même s’il a clamé que le Mondial 2026 était son objectif, le Bénin a débuté les qualifications avec un seul point glané lors des deux premières journées contre l’Afrique du Sud, désormais médaillé de bronze à la Can 2023 et le Lesotho à l’extérieur. Dans un groupe où figure le Nigéria, vice-champion d’Afrique en titre futur adversaire du Benin en juin prochain à Cotonou, la tâche est loin d’être aisée pour finir en tête du groupe et rêver d’une première coupe du Monde au Canada-USA – Mexique d’autant puisque les qualifications s’étendent jusqu’en octobre 2025. Le sélectionneur doit bien ruminer son premier bilan négatif avec trois défaites et cinq nuls, huit buts marqués pour onze encaissés, la question de la philosophie du jeu est bien amorcée mais avec autant de certitudes recherchées notamment sur le plan défensif. Le prochain chantier imminent sera la Can Maroc 2025 dont le tirage au sort est attendu dans les semaines à venir. Les qualifications se tiendront d’ailleurs en fin d’année 2024 en septembre, octobre et novembre. Des rendez-vous d’ores et déjà cruciaux. Absent de la scène continentale depuis 2019, le Bénin a manqué les deux dernières éditions de la Can qui devrait être le premier objectif à viser en toute humilité.
La révolution en marche
A sa prise de fonction, Rohr n’a pas mis du temps à intégrer les U20 issus de la génération qui a disputé la dernière Can 2023 en Egypte et quelques locaux repérés par ses soins dès ses premières listes. Un vent de fraîcheur a commencé à souffler. Le sélectionneur a tranché en se passant des services des services de certains trentenaires comme Jordan Adéoti (34 ans) et Michael Poté (39 ans) dans une optique de reconstruction. Les anciens capitaines Stéphane Sèssegnon et Khaled Adénon aussi ont quitté le navire. Steve Mounié et Saturnin Allagbé sont désormais propulsés aux rangs de capitaines de la sélection béninoise. Andréas Hountondji, Steven Warren Traoré, Brandon Agounon ont été les premiers binationaux ralliés par le sélectionneur. Ce dernier a aussi lancé huit joueurs de moins de 22 ans à savoir : Rachid Moumini (19 ans), Rabiou Sankamao (20 ans), Tamimou Ouorou (20 ans), Dodo Dokou (19 ans), Imourane Hassane (20 ans), A. Hountondji (21 ans) , Prince Ricardo Dossou (17 ans) et David Tchetchao (20 ans). Un record. La révolution est bien enclenchée dans ce sens.
Les points noirs
Tout n’est pas parfait dans le fonctionnement du sélectionneur. D’abord, il a snobé la presse locale sur les deux dernières listes dévoilées sans daigner se présenter en conférence de presse. La pilule n’est pas passée. Au-delà des choix qui n’ont pas fait l’unanimité, il a échoué lamentablement sur le chantier local. Première remarque, Rohr n’a pas élu domicile sur le territoire béninois. Etrange pour un sélectionneur national. Ce qui fausse la base du travail à l’échelle locale. Le sélectionneur ne suit pas régulièrement la ligue locale. Pour preuve aucun stage n’a a été organisé pour les joueurs locaux de près ou de loin sous sa supervision depuis sa prise de fonction. Une anomalie. Car le Bénin ne dispose pas d’une pléthore de joueurs professionnels au point de reléguer la pépinière locale aux oubliettes. Ensuite, le casting local est biaisé car délégué en grande partie à l’ancien staff qui n’a pas de résultats aussi bien dans les qualifications du Chan que dans les choix judicieux. Le championnat jouit d’une régularité depuis plusieurs années et les meilleurs mériteraient plus de lumière. Ce travail de fond permettra assurément au sélectionneur de mieux cerner le marché local, l’étendue de son chantier. Il devrait aussi asseoir un socle local connu. Ceci deviendrait aussi une passerelle crédible vers les A. Mais en une année rien n’a été fait et cela ne semble inquiéter personne. Puis, la question du staff aussi se pose. Le monde de fonctionnement en mode « mercenaires » uniquement sur les matches internationaux ne rend pas vraiment service pour la continuité du travail. Personne ou presque ne travaille à plein temps pour les intérêts de la sélection nationale. Aussi, Rohr n’a pas coupé le cordon avec l’ancien staff qui était en fin de cycle dont les derniers résultats étaient mauvais. Cette dernière tendance déteint inexorablement sur le travail du technicien franco-allemand qui semble traîner les mêmes démons sur certains aspects. La nécessité d’un nouveau regard à l’image de la coupure réalisée par Michel Dussuyer lors de sa prise de fonction en 2018 ne serait pas une mauvaise idée. Le changement passe aussi par là et la nécessité se lit aisément après une année.
Géraud Viwami