La semaine dernière, le Bénin a bouclé le stage d’octobre avec deux matches amicaux contre la Sierra Leone et le Madagascar . Avec un nul (1-1) et une défaite (1-2), les béninois sortent de cette expédition marocaine avec cinq leçons majeures à retenir notamment pour le sélectionneur Gernot Rohr au-delà des résultats.
Revoir l’animation au milieu et l’esprit collectif
En choisissant un schéma à trois défenseurs centraux, Rohr a opté pour un milieu en double pivot qui a été rapidement noyé. Au-delà de la difficulté individuelle éprouvée par le duo Olaitan – d’Almeida, l’animation collective défensive autour de la ligne du milieu souvent battue sur les deux matches doit être repensée. Revenir à un trio serait bien plus vital pour soigner le déséquilibre remarqué sur les deux matches. Les rôles aussi seront déterminants entre le positionnement d’une sentinelle devant la défense pour sortir les ballons et deux relayeurs pour assurer la transition offensive. Ou jouer avec deux pivots devant la défense et un meneur de jeu plus libéré pour les tâches offensives. Le technicien doit trouver la meilleure formule par rapport au matériel des joueurs disponibles mais jouer à deux milieux rend la tâche extrêmement difficile aux éléments choisis en termes de coffre et de volume de jeu pour tenir l’équipe. Car la bataille du milieu a été perdue sur les deux amicaux et devraient servir d’enseignement avant les matches éliminatoires du Mondial à venir en novembre.
Associer Mounié et Aiyegun en attaque
Le passage à un milieu à trois pourra ouvrir la porter à la formation d’un duo d’attaque qui serait aussi complémentaire que tranchant pour le Bénin dans un 3-5-2 pur à la façon de l’Inter Milan version Simone Inzaghi. Associer Mounié et Tosin Aiyegun dans un duo en attaque, et si c’était la bonne idée?. Le premier intronisé capitaine de l’équipe est l’actuel meilleur buteur de la sélection avec 15 buts, à la chasse du record de Stéphane Sessègnon (24 buts). Pivot de qualité connu pour son jeu de tête, sa capacité à peser sur les défenses adverses et sa débauche dans le pressing sera un premier point d’ancrage. Le second est une flèche puissante avec une finition remarquable. Joueur de pressing connu pour sa puissance athlétique et sa vitesse , il a des qualités bien complémentaires à celle de son capitaine pour former le duo quasi parfait. Il a déjà signé 3 buts et délivré 2 passes décisives en 12 sélections sous le maillot de la sélection béninoise. Sa polyvalence complique son utilisation sur un couloir qui s’assimile à un sacrifice car le lorientais a été bien plus efficace dans une position axiale comme lors de ses premiers matches en sélection. C’est dans cette même position qu’il a sorti la meilleure saison de sa carrière à Zurich en 2022-2023 en pointant 16 pions. Une association qui pourrait faire des étincelles. Derrière, Andréas Hountondji, auteur de son premier but international contre le Madagascar qui est aussi utilisé dans une position d’attaquant axial à Rodez (dans un 3-5-2) où il a brillé lors du dernier stage avec les Guépards sera aussi dans son élément même si c’est dans un rôle de troisième larron. Les trois attaquants seront tout au moins assurés d’être efficaces dans une utilisation naturelle.
Donner les clés du jeu à Soukou
Inutile de rappeler son statut de meilleur passeur actuel de la sélection béninoise alors qu’il n’est international que depuis mars 2019, il n’est plus loin de sauter le record du chirurgien en équipe nationale du légendaire Mouri Ogoubiyi (11 passes décisives). Cèbio Soukou devrait être un joueur majeur de la ligne offensive du haut de ses 4 buts et 8 passes décisives en seulement 21 capes. Mais les deux premiers rendez-vous manqués depuis la prise de fonction de Rohr passent mal apparemment. Le milieu offensif de Bandirmaspor laissé à carreau à la surprise générale contre le Mozambique en septembre était remplaçant lors du premier match contre la Sierra Leone. Il a dû attendre la blessure de Steve Mounié pour entrer en jeu contre les Lones Stars puis il est resté sur le banc intégralement sur le second match. Un déclassement étonnant pour l’un des joueurs les plus armés techniquement au sein de l’effectif capable de porter l’équipe par sa vista et son aura de leader technique. Son expérience personnelle avec 67 buts et 40 passes décisives en carrière doit être un facteur clé (buteur contre le Bayern Munich en Bundelisga) car aucun joueur de l’effectif actuel n’a ce pédigrée. Rarement décevant avec le maillot jaune, il mériterait tout même un peu plus de considération à juste titre dans un secteur où l’équipe en a bien besoin.
Zapper les remplaçants et remettre les « sénateurs » en cause
Si Rohr a été applaudi pour sa politique de rajeunissement assumée dès sa prise de fonction, il l’est beaucoup moins pour celle des deux poids deux mesures pratiquée récemment sur le statut de certains joueurs. Le sélectionneur l’a avoué qu’il a retenu des joueurs en manque de temps de jeu en club et au rythme défaillant. Un aveu qui frise la faute professionnelle car convoquer des joueurs en jambes en équipe nationale est un principe de base. Les derniers choix du techniciens ont tôt fait de créer l’incompréhension et la frustration au sein du groupe. La concurrence sur fond de méritocratie est passée pour du beurre aux yeux de tous.
L’autre point noir, c’est la gestion des performances de certains joueurs qui sont en dessous de la moyenne en équipe nationale mais dont les statuts ne sont pas en question. Ces derniers ne repoussent aucunement leurs limites au sein de l’équipe à croire que leur place est garantie de toute façon. Une nouvelle fois, la question de la remise en cause et la concurrence font débat. Le sélectionneur doit désormais trancher.
Rohr n’a plus de joker
Sous contrat jusqu’en 2026, Rohr a visiblement le véto pour construire mais les résultats prennent du temps à venir. En six matches officiels, il n’a toujours pas décroché le moindre succès sur le terrain. 2 défaites et 4 nuls, un bilan en dessous des attentes. Sur les quatre matches disputés en qualifications de la Can 2024, aucun succès décroché face au Rwanda , Mozambique et Sénégal, unique top nation jouée. Insuffisant. Se qualifier pour la Can aurait été un bon début mais l’ancien niçois a grillé un premier joker. Les chiffres sont loin d’être satisfaisants avec 9 buts encaissés sur les 6 matches disputés, la défense est devenue un chantier majeur où l’équipe doit progresser collectivement. Le gros point faible : le côté droit de la défense. Même si Rachid Moumini est impliqué offensivement sur deux buts contre le Sénégal et le Mozambique en 4 sélections, il n’est pas non plus une assurance garantie défensivement. C’est aussi par ce même couloir que le Bénin a concédé quatre de ces six derniers buts encaissés sur les trois derniers matches disputés dont la moitié contre le Mozambique à Maputo. Un hasard? L’attaque est en bonne voie avec 7 buts inscrits, un motif d’espoir combiné à l’entrain offensif apporté et les situations obtenues sur les derniers matches. Même s’il a clamé que son objectif prioritaire était le Mondial 2026, la machine n’est pas encore bien lancée pour rêver de l’Amérique du Nord dans trois ans. La bataille commence dès novembre où le Bénin sera déjà attendue contre l’Afrique du Sud et le Lesotho pour les deux premières journées des qualifications. Le sélectionneur n’a plus vraiment le temps d’attendre.
Géraud Viwami
Je suis vraiment sidéré par la finesse de vos analyses et la précision de vos propos. Cela dit, je pense que l’entraineur a une addiction pour certains joueurs dont Jodel Dossou et autres d’Almeida….négatif ! Par ailleurs le défaut de Direction technique nationale se fait maintenant sentir… L’actuel n’est pas dans le rôle ou ne sait pas comment l’être. Dans ce contexte, L’entraineur adjoint qui lui, n’avait obtenu résultat positif devient le joueur de rôle majeur pour la composition des équipes…Et lui, il a des amis qu’il fait revenir a tout moment, quelle que soit leur forme ! Certains des nôtres qui jouent en Afrique comme le portier qui evolue en Ethiopie ne sont jamais appelés. Je desespère pour ce groupe. Celui qui doit partir c’est l’entraineur adjoint pour que le sélectionneur soit libre dans ses choix. Après on verra. Car dans le contexte actuel, même si le Centre de Ndali nous livre des genies, ils ne seront jamais alignés…on leur préfèrera des binationaux évoluant en 4ème ou 5eme division étrangère.