Billet de Géraud Viwami : Bénin – Maroc, la leçon du temps
Cette semaine, dans la ferveur de la qualification du Maroc en Coupe Monde Qatar 2022, j’ai reçu de nombreux messages avec la question suivante « C’est le même Maroc là que nos Ecureuils ont battu à la Can Egypte 2019 ? ». Euh oui, mais l’eau a coulé sous les ponts depuis trois ans maintenant.
D’abord, félicitations aux marocains pour cette historique accession au dernier carré du Mondial. Première nation africaine à signer cet exploit. Dans cette équipe qui fait la fierté de tout un continent, on retrouve quelques éléments de la formation que le Bénin avait affronté en aout 2019. Hier, cinq des onze titulaires d’il y a 3 ans ont participé à la victoire face au Portugal. Youssef En Nesry, auteur du but de la victoire face au Portugal était celui dont le tir au but avait été arrêté par Saturnin Allagbé, le gardien beninois. Sofiane Boufal qui brille sous les yeux du monde aujourd’hui n’avait même pas trouvé le cadre pendant cette séance fatidique. Quant à Hakim Ziyech, personne n’a oublié que c’était lui qui avait mis le penalty de la dernière minute sur le poteau contre le Bénin.
Mieux, grosse révélation de ce tournoi, Azzedihne Ounahi aime bien la compagnie des béninois. Après avoir été coéquipiers avec Khaled Adénon à Avranches en National 1 en 2020-2021, il partage actuellement le même vestiaire que Cédric Hountondji à Angers en Ligue 1.
Depuis 2019, le Maroc s’est bien relevé de cet échec en huitièmes face au Bénin en passant de Hervé Renard à Vahid Hallilodzic puis Walid Regragui. Ce dernier qui récolte à juste titre tous les honneurs aujourd’hui. Le Maroc a eu le temps de faire un quart de finale de la Can Cameroun 2022, de remporter le Chan Cameroun 2021 avec sa sélection locale et même la Ligue des Champions avec le Wydad Casablanca en 2022, conduit déjà par Regragui. Sans oublier le développement des infrastructures locales dont le centre technique que Hallilodzic place au même niveau que Clairefontaine en France. La moitié de l’effectif marocain actuellement présent au Qatar a été formé ou débuté sa carrière au Maroc. La fiabilité du championnat n’est plus à prouver. La RS Berkane par deux fois et le Raja Casablanca ont remporté les trois dernières éditions de la Coupe de la Caf.
Pourtant, au dernier mercato un club béninois a jugé que le championnat marocain n’était pas une destination idéale pour un joueur qui disposait d’une offre de transfert plutôt juteuse. Quand on parle de culture foot.
La transition vers le Bénin est un peu brutale, je l’avoue. Pendant ce temps, le Bénin a eu le temps d’instaurer un championnat à 36 clubs, jamais vu dans le monde entier. Nos clubs n’ont réussi que des miettes d’exportations vers l’extérieur en plus d’être à la traine en coupe africaines. Le chantier local est toujours aussi vaste, voire vide comme la direction technique nationale qui n’existe toujours pas.
Les Ecureuils ? C’est le bordel, il faut le dire. Après l’échec des qualifications de la Can 2022. Puis celui en qualifications du Mondial à un point près face à la RD Congo. D’ailleurs, si les béninois avaient passé ce tour, ils auraient affrontés les marocains en barrages…
Oublions ça, la prochaine Can Cote d’ivoire 2024 est déjà mal embarquée avec deux défaites en deux journées. L’intérimaire a déjà montré ses limites sur tous les plans et s’est bien rapproché de la porte de sortie. Plus d’un an après la fin de contrat du dernier numéro Un connu, le Bénin recherche toujours un sélectionneur « haut de gamme ». Actuellement, les faveurs vont vers un sexagénaire qui n’a plus entrainé de sélection en Afrique depuis 2005, reconverti viticole en France. Une sortie de retraite en quelque sorte. Donc tout ça pour ça ? En plus, ce dernier fait quasiment patienter tout un pays à cause d’obligations personnelles depuis presque deux mois. Pendant ce temps, un entraîneur frais et courtisé par les clubs hexagonaux, double champion d’Afrique avec une expérience récente conséquente sur le continent qui pourrait bien porter la veste du renouveau est snobé depuis des mois. Non cela ne nous fait pas envie, comme quoi.
Une petite pensée aussi aux joueurs qui sont devenus des sénateurs en équipe nationale qui ont perdu le sens du devoir national.
On n’a toujours pas d’équipementiers avec des sélections habillées avec un mélange de fringues qui reflète bien l’amateurisme qui entoure les Ecureuils.
Rappelons que les qualifications Chan 2023 débuteront dans six mois environ, si l’intérimaire doit prendre la porte après deux échecs sans relief, les A’ ont aussi besoin d’un nouveau souffle. Le Bénin est la seule nation de la sous-région qui n’a jamais pris part à ce tournoi. Un constat qui contraste avec les efforts nationaux. Actuellement, on se demande si quelqu’un travaille pour la mise en place d’une équipe locale dans les mois à venir.
Bref, la marche est encore longue et voilà où le Bénin en est réellement.