Billet de Géraud Viwami : Le football ne ment pas, surtout au Bénin

Le Bénin n’est pas un pays de foot. C’est un fait. Plus d’un mois après l’amère élimination des Ecureuils pour la Can Cameroun 2022, nous sommes tous revenus sur terre. Entre déception et lucidité, il faut savoir dresser un bilan parce qu’en réalité nous trichons.

La fédération. Nid d’incompétence. Comment un pays qui n’a pas organisé de stage de formation d’entraîneur depuis 2014 peut espérer évoluer dans un sport ? Oui ! vous avez bien lu. Ce déficit pose facilement la question du projet de développement du football béninois. En place depuis 2018, le nouveau bureau exécutif n’a clairement pas de plan de travail. Elle devrait être la tête pensante de notre football mais  hélas. C’est elle, qui organise un championnat national avec un chamboulement désiré par les plus influents. C’est elle, qui ne  pense pas à organiser des ligues de jeunes fiables. C’est elle, qui nomme un directeur technique par intérim juste pour répondre à un besoin ponctuel de la Fifa. Ce dernier n’a pas de feuille de route, pas d’équipe ni de moyens pour s’exécuter aux tâches. C’est elle,  qui n’assume aucune responsabilité en termes de communication par exemple. C’est elle, qui est incapable de trouver des sponsors pour être automne. C’est elle,  qui est incapable de mettre en place un réel projet national pour faire grandir le football local. C’est elle, qui est incapable de nommer des sélectionneurs U17, U20 et U23 à plein temps pour un travail durable afin de préparer les échéances. C’est elle, qui n’a toujours pas résolu la question de l’équipementier des Ecureuils qui ont joué les derniers matches avec des maillots bons marchés. On a bien critiqué l’ancien système pour ces magouilles, l’actuel est mieux dans son attentisme ? Elle est clairement suspendue au ministère des sports qui n’est pas loin de devenir celui du foot. Nous assistons à des choix de gouvernances sans incidence  sur l’avenir à court ou moyen terme. On a passé trois années du mandat en cours à résumer l’état de notre football aux résultats des Écureuils. Comme toujours. Quand le gouvernail ne sait pas où aller, naviguer à vue est inévitable.

Les Ecureuils. Mascarade. Ils ne méritaient pas d’aller à la prochaine Can. Mickael Poté a eu l’humilité de le reconnaître. Il ne faut pas se voiler la face. Le Bénin n’était pas au niveau sur le terrain lors des dernières qualifications. C’est peut-être facile à dire maintenant mais c’est la triste réalité. L’équipe A est souvent l’arbre qui cache la forêt mais tout est mis à nu désormais avec cet échec. Retour à la case départ. Le Bénin était en quarts de finale à la Can Égypte 2019, mais ne fait pas partie des huit meilleures nations du continent africain. On l’acceptera plus facilement maintenant. Deux ans après la dernière Can, où sont les axes de progressions de l’équipe ? L’élan qui devrait être le nôtre en est où ? Le renouvellement progressif de l’effectif à tâtonner. On a voulu nous faire croire que conserver des préretraités étaient mieux que lancer des jeunes. On a fait des choix contestables. On n’a pas vu de concurrence s’installer. On a galvaudé le statut de certains joueurs sur des échéances clés. On n’a jamais su s’adapter également. Il faut avoir le courage de reconnaître que le cycle actuel touche à sa fin. On peut faire semblant de croire à une continuité même si le sélectionneur, qui n’a plus de ressort, a été miraculeusement confirmé. Vous souvenez quand on parlait de scission née dans le groupe à cause des primes de qualifications impayées de la Can 2019? Donc, vous avez forcément eu vent des tensions entre les joueurs pendant le stage avant la Sierra Leone. Passons. La solidarité et l’union qui étaient le socle de l’équipe béninoise sur le terrain et en dehors se sont dissipées. La loi de la nature du football? peut-être que oui. On n’a pas respecté l’esprit d’équipe de ce sport. Et on l’a bien payé. Je rappelle à tous que le Bénin a connu quatre Can dans son  histoire pour le bilan suivant : 14 matches, 7 buts marqués, 24 encaissés et zéro victoire à l’issue du temps règlementaire. Il nous a fallu neuf ans de souffrance pour retrouver la Can après notre avant-dernière qualification en 2010. Certains sont devenus amnésiques après l’exploit de 2019 mais notre vrai niveau est ainsi bien résumé.

 

La formation et développement football local. Inexistante. En mars 2021, à cause du véto de certains clubs français,  le Bénin était potentiellement privé d’une dizaine joueurs évoluant notamment en Hexagone. Panique à bord. Parce que le sélectionneur n’avait pas de solution de rechange de grande qualité. Premièrement parce qu’il ne ratisse pas large dans sa présélection. Le groupe est fermé certains joueurs sont quasi snobés. Ensuite parce que le Bénin n’a pas un vivier conséquent en termes de joueurs expatriés à bons niveau. Pendant que d’autres sélections remplaçaient les joueurs forfaits sans sourciller, le staff béninois avait les maux de tête. De manière générale, plus de la moitié de l’effectif des Ecureuils a été formée à l’étranger. Cet épisode rappelle la défaillance de notre formation depuis trente ans. Déjà pour relever le niveau local ensuite permettre l’exportation des meilleurs. Ces derniers qui serviront de vitrine à l’étranger puis reviendront renforcer et drainer la sélection nationale au plus au haut niveau. Si des joueurs d’origines béninoises comme Jules Koundé et Colin Dagba tutoient le plus haut niveau, le sang de Guézo n’est pas damné. On peut le faire aussi. C’est le système qui tue les talents d’abord. Zéro politique de formation pour les joueurs, pas de formation pour les formateurs tout ceci couronner par des clubs qui n’ont pas de modèles ni de carnets d’adresses dans le foot business. Prenons un exemple sur la saison écoulée. L’unique joueur béninois qui a signé un contrat professionnel dans un championnat respectable en quittant le Bénin c’est l’ancien capitaine d’Esae, Marcel Dandjinou, le gardien de JDR Stars en Afrique du Sud.  On sait tous pourquoi les béninois ne s’exportent alors que les pays de la sous-région y parviennent. Mais on fait semblant. Le baromètre de notre réel niveau est aussi là.

Géraud Viwami

 

 

Geraud V.

Rédacteur en chef ! Passionné de foot un peu trop attaché aux Écureuils du Benin. @GerovinhoV

Une réflexion sur “Billet de Géraud Viwami : Le football ne ment pas, surtout au Bénin

  • 12 août 2021 à 12 h 15 min
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    Vérité absolue .mais est ce que cela va changer quelque chose ? Nos autorités n’ont pas d’oreilles Pour entendre ni de yeux pour lire . Vivement un changement pour le plaisir du sport en général .

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