Deux jours après l’exploit réalisé face à l’Algérie, nous avons croisé le sélectionneur des Ecureuils, Michel Dussuyer. Le technicien français nous a accordé un entretien exclusif où il parle de tout. Son retour au Bénin, son effectif, ses premiers pas sur le banc béninois, la suite des qualifications et son plan de travail. Entretien complet.
Quand l’arbitre siffle la fin du match contre l’Algérie, vous vous dites quoi dans votre tête ?
C’est toujours pareil, quand on gagne 1-0 contre une équipe potentiellement supérieure. On est très fiers et heureux d’avoir fait cette performance. Après c’est vrai qu’il y a eu beaucoup de tensions en seconde période parce qu’il y a eu cet arbitrage discutable qui a fait monter la tension d’un cran. Il y a avait une telle énergie dans ce stade. Ce n’était pas un calvaire. Franchement j’avais confiance en mes joueurs. Ce qu’ils étaient capables de faire. Sans arrêts, il faut les replacer, les booster, les encourager, ne pas laisser d’espace à cette équipe. Protéger notre acquis. Je n’étais pas « tremblants » Il y a avait de l’énergie. Je ne vais pas dire « qu’ils ne pouvaient rien nous arriver » mais c’était un peu le sentiment que j’avais.
La victoire face à l’Algérie vu le contexte, un deuxième match en trois jours, trois points de retard face au favori du groupe, est-ce qu’elle est aussi grande que celle de 2009 face au Ghana ?
Non pas pour moi. Parce que le match du Ghana en plus c’était un aboutissement parce que c’était aussi. Le scénario du match fait qu’on a marqué dans les arrêts de jeu donc. Il y a avait beaucoup d’émotions en plus c’était une qualification. La victoire face au Ghana reste un peu au-dessus.
Face à l’Algérie entre le comportement des Ecureuils à dix ou à onze ou la réaction du public qu’est-ce qui vous a le plus surpris. ?
Ni l’un ni l’autre. En fait je sais que ce groupe à de la valeur des vertus morales, prêt à se battre sur le terrain. Ils l’ont largement démontré. Je sais que les béninois qu’ils sont en confiance et qu’ils en croient en leur équipe ils sont prêts à pousser. Je connais le public. Je n’ai pas été réellement surpris. J’étais enthousiasmé par la volonté et le courage des uns et des autres.
On vous a vu demander plusieurs fois au public de pousser les joueurs, sans lui ça aurait été compliqué avec les dix minutes d’arrêts de jeu interminables…
Oui ! Quand on s’est retrouvés à dix j’ai demandé le soutien parce que c’est difficile pour les joueurs, à ce moment-là le public permet aux joueurs de se sublimer, de faire encore plus d’efforts de ne pas lâcher de continuer à courir se replacer même s’ils sont fatigués. Parce qu’il y a un engouement.
Le rouge de Stéphane Sèssegnon a révélé une autre face de votre équipe, dominatrice en première période avec maîtrise et beaucoup de solidarité sur la seconde, ce rouge est finalement un mal pour un bien ?
Non ! c’est mal parce qu’on se retrouve en difficulté, on perd Stéphane pour un ou plusieurs matches. Je ne sais pas encore. C’est préjudiciable. C’est vrai que le groupe a affiché encore plus un surcroit de solidarité derrière donc ça c’est positif.
En Algérie, le Bénin a fait un match à deux face également, comment ça se fait que l’équipe change de visage à chaque mi-temps, qu’est-ce que vous leur dites à la pause ?
Ça dépend du scénario du match. A Blida, on était parti dans un contexte en jouant à l’extérieur sur un bon terrain qui met en valeur les qualités techniques de cette équipe d’Algérie devant son public. Donc on n’allait pas faire les fanfarons en arrivant. D’abord se rassurer sur le plan défensif et on a bien entamé le match, on ne laissait pas beaucoup d’espaces. L’objectif c’était de durer, d’énerver un peu les algériens, d’arriver à sortir, se projeter vite vers l’avant, récupérer de bons ballons. Malheureusement ça s’est un peu écroulé avec ce but sur corner. Ça a changé un peu la face des choses.
« Faut qu’on soit très fort aussi mentalement pour aller chercher un résultat à Banjul »
Arrivé sans avoir le temps de faire des matches amicaux, en trois matches officiels on a vu les Ecureuils dans un 3-4-3, 4-4-2, 4-3-3 puis un 4-4-1 à dix, comment définissez-vous tactiquement votre équipe ?
Je l’ai dit en préambule lors de la première conférence de presse, un sélectionneur s’adapte d’abord aux caractéristiques de son effectif avant de s’adapter aux caractéristiques de l’adversaire. Mais je ne suis pas quelqu’un qui soit adepte de s’adapter forcément à l’adversaire. Mais plus par rapport à mon effectif aujourd’hui j’ai une situation où il y a un déficit de milieu de terrain où c’est un peu difficile. Il y avait un petit problème aussi sur le poste de latéral droit. L’idée c’était qu’on avait des défenseurs centraux, on peut les aligner. Ça va nous obliger peut être à reculer un peu sur le terrain, récupérer des ballons un peu plus bas. Mais ça va nous donner une garantie défensive. Commencer par deux matches à l’extérieur au Togo et en Algérie. Il s’agissait de se rassurer un peu sur cet aspect. Se dire que quand on voyage qu’on soit costaud. Le retour ici à Cotonou c’était aussi une configuration où l’Algérie jouait avec un seul attaquant d’axe au départ après ils ont changé mais aussi j’aime jouer avec un milieu de terrain renforcé.
Pour avoir le contrôle du ballon ?
Déjà pour essayer de récupérer le ballon un peu plus haut et puis d’avoir une meilleure maîtrise collective.
Le Bénin a 7 points en 4 journées dans un groupe où rien n’est joué, la qualification est loin d’être acquise…
Il y a rien de fait. On a fait un pas de plus. C’est vrai qu’on est en bonne position. On a notre destin entre nos mains quoi qu’il arrive, ça c’est positif. Bien sûre qu’il reste du chemin. On a deux matches très difficile à négocier. Parce que ce match en Gambie qui va arriver vite, on connait un peu le contexte là-bas. Il y a un bon effectif, de bons joueurs, un terrain qui est difficile. On aura fort à faire, à nous d’afficher un bon état d’esprit. Même si ce n’est pas l’Algérie qu’on va rencontrer faut qu’on soit très fort aussi mentalement pour aller chercher un résultat à Banjul.
Si on devait faire un tableau descriptif du style de vos adversaires dans ce groupe…
Je dirai qu’entre le Togo, la Gambie et le Bénin, il y a beaucoup de similitudes. La qualité de l’effectif, les caractéristiques des joueurs, il y a un peu plus de leader avec la présence d’Emmanuel Adébayor au Togo, Sèssegnon au Bénin, il y en a pas encore en Gambie, il y a des joueurs qui jouent à excellent niveau là-bas. Je pense que c’est assez homogène. Après on fera une différence avec l’Algérie qui à l’un des effectifs, les plus beaux d’Afrique.
Vu la similitude entre le Togo, la Gambie et le Bénin, la déception serait très grande si les Ecureuils n’allaient pas au bout de ces qualifications ?
Oui bien sûre. C’est un groupe qui est difficile parce qu’il est très homogène justement donc. Notre objectif, c’est d’en sortir, c’est d’aller au Cameroun. Forcément qu’on sera extrêmement déçu si ce n’est pas le cas.
Les Ecureuils ont réalisé deux cleans sheet en trois matches, l’assise défensive est naissante par contre offensivement, un petit but en 3 matches, des progrès à faire sur l’animation offensive ?
C’est un mix de tout ça, il ne faut pas oublier qu’on a joué deux matches à l’extérieur sur les trois et que le troisième à domicile c’est quand même contre l’Algérie. C’est toujours difficile d’avoir une véritable évaluation du potentiel offensif même si il y a des joueurs de qualités chez nous. Quelques fois j’ai reproché un peu le manque d’esprit de décision à Blida, un manque d’agressivité sur le plan offensif. Sur le retour ça été un tout petit peu mieux. Maintenant on n’est pas toujours très précis à la finition. On travaille encore là-dessus. On va s’améliorer avec le temps.
Pour résumé, votre philosophie dans le court ou moyen terme devrait ressembler à…
Je ne suis pas dans ce registre des entraîneurs qui s’adapte à l’adversaire, qui détruisent avant de construire quelque chose. Je suis plus dans la construction, le plaisir de pratiquer un bon jeu si possible, offrir un peu spectacle et d’avoir une maîtrise collective qui soit de qualité. Après il faut prendre des points pour se qualifier. Le deuxième aspect très important c’est le temps. Vous savez, on a beaucoup moins de temps qu’en club. On travaille quoi ? Maximum deux jours. Les 48 premières heures sont pour la récupération. Si on joue samedi ou dimanche. Quand on joue dimanche on a mercredi et jeudi. Quand on joue samedi, on n’a que le mercredi.
Face au Togo vous avez sélectionné 21 joueurs, puis 22 face à l’Algérie avec à chaque fois un forfait non remplacé, et pourquoi n’avoir pas pris 23 comme en règle général et l’absence aussi d’un troisième gardien ?
Pour le troisième gardien ce n’est pas une nécessité, peut-être la prochaine fois on verra. On est toujours à temps de rappeler un gardien dans le cas échéant. C’est une possibilité. Après la difficulté pour moi c’est de me situer par rapport à Christophe Aifimi qui est pré convoqué mais en ce moment ne joue pas en club. J’essaye d’avoir des informations précises sur lui. Ce n’est pas définitif. C’est ponctuel. Après pour les forfaits non remplacés. Je perds un milieu de terrain (Mama Seibou). Honnêtement par rapport aux critères que je retiens, au temps de jeu, aux informations que je peux avoir. C’était difficile de le remplacer.
« Jules Koundé, pour l’instant sa priorité c’est l’équipe de France »
C’est votre deuxième passage à la tête de l’équipe béninoise. Il y un lot de joueurs que vous connaissiez et des nouveaux que vous découvrez, sans comparer au groupe d’il y a huit ans comment évaluez-vous le niveau actuel de l’effectif sur les deux premiers rassemblements ?
Il y a de la qualité. Aujourd’hui on a un effectif avec un noyau de joueurs qui sont des joueurs de qualités. Après cet effectif demanderait à être un peu amplifié en quantité et qualité à certains postes.
Lesquels par exemple…
Je l’ai dit au milieu de terrain pour l’instant on est un peu en difficulté. Il y a des postes où on peut essayer de trouver un peu de qualités. Faisons avec les joueurs béninois qui sont éligibles. On n’est pas un club où on peut recruter. De toute façon ce n’est pas possible, il faut composer avec les joueurs béninois qui sont là, qui jouent, qui sont performants. On verra. J’aurai le temps de découvrir le championnat local, de voir s’il y a des joueurs qui ont du potentiel et qui peuvent prétendre à venir compléter ce groupe des A.
En parlant du poste d’arrière droit, vous avez replacé Seidou Barazé à droite, entre Blida et Cotonou vous êtes satisfait de cette expérience ?
Seidou joue dans l’axe dans son club, comme Chaona d’ailleurs même milieu défensif. C’est un joueur qui sait s’adapter, c’est un joueur qui est vaillant, qui a du caractère, qui est présent dans les duels défensifs. On demande avant tout à un défenseur latéral de bien défendre. Après s’il apporte un plus offensif, cela n’en est que mieux mais la première des choses que j’ai demandé à Seidou surtout dans le contexte de ces deux matches contre l’Algérie c’était de bien défendre.
Vous avez parlé de joueurs à voir, Anaane Tidjani est sorti du groupe pour le dernier rassemblement, Jean-Marie Guera est arrivé, on doit s’attendre à chaque liste à une petite surprise comme cela ?
Oui. Même si je l’ai dit, le noyau il n’est pas très grand. J’essaye au maximum de prendre les informations sur tout le monde, c’est de projeter aussi. Les binationaux qu’on peut convaincre de rejoindre les Ecureuils. Il y a différents secteurs sur lesquels on essaye de travailler, l’objectif c’est d’enrichir ce groupe en qualité et quantité.
Puisqu’on en parle je vais évoquer des noms de potentiels binationaux et vous nous direz ce qu’il en est de leur situation par rapport aux Ecureuils ?
On y va
Jonathan Ligali qui a récemment déclaré à la BBC qu’il est prêt à rejoindre le Bénin ?
Je n’ai pas encore discuté avec lui. On va avoir une discussion certainement.
Cebio Soukou ?
Je l’ai eu, il m’a dit qu’il était prêt à venir jouer pour le Bénin. Après il faut obtenir un passeport. Il faut du temps. Il faut monter un dossier auprès de la Fifa. Avec le cas de James Olufadé au Togo, il faut être très prudent. Il faut prendre toutes les garanties avant de lancer un joueur comme ça. Je n’ai pas pu me déplacer mais comme mon adjoint Moussa Latoundji habite à Berlin pas loin de Rostock il est allé le rencontrer à ma demande. Cela s’est bien passé, il a eu un bon retour.
Yannick Aguémon ?
Il avait donné son accord. Son dossier à la Fifa est toujours en cours, on n’a pas encore reçu la réponse de la fédération française de football parce qu’il a été international chez les jeunes français. Il faut monter un dossier solliciter la FFF qui pour l’heure n’a pas encore répondu. Mais comme Yannick je l’ai eu il y a deux semaines au téléphone, il s’est blessé assez sérieusement au genou. Il en a pour des mois en tout cas il ne sera pas éligible pour le mois de novembre c’est certain.
Colin Dagba ?
Je ne suis pas encore entré en contact avec lui. J’aimerais avoir une discussion mais on sait déjà que ce sera difficile.
Jules Koundé ?
Je l’ai eu. On a eu à échanger. Pour l’instant sa priorité c’est la France.
Femi Hollinger-Janzen ?
Je l’ai connu parce qu’il est un joueur d’origine béninoise. Il joue très peu en club pour l’instant ce n’est pas une priorité.
Le gros dossier Daniel Didavi ?
J’ai eu une discussion avec son père il y quelques temps. Pour l’instant c’est toujours un peu bloqué pour des raisons que je ne peux pas évoquer ici.
« Olivier Verdon, cela m’as surpris qu’il soit à ce niveau-là »
Parmi les joueurs que vous avez découverts au quotidien sur les rassemblements, qui vous impressionne ?
(Il réfléchit) je n’aime pas trop mettre en avant certaines individualités plus que d’autres. Je les connaissais déjà les joueurs, Steve Mounié , David Kiki , Jodel Dossou je l’ai connu tout jeune ici, David Djigla. Ce sont des joueurs dont j’avais déjà les informations donc. S’il y a un qui est très bon c’est Olivier Verdon, sur les deux matches il a vraiment pris une dimension supplémentaire.
Il a été désigné homme du match sur Bjfoot face au Togo et très au niveau contre l’Algérie…
Il a fait trois très bons matches. C’est vrai qu’il s’est révélé sur ces matches-là. C’est un jeune joueur (Ndlr : 22 ans) il n’a pas beaucoup de vécu. Avec Bordeaux, il n’a pas beaucoup joué en pro. Il débute avec Sochaux, il a du temps de jeu. Cela m’a surpris qu’il soit à ce niveau-là. Lui aussi a beaucoup appris à travers ces matches. Cela veut dire que c’est un garçon qui a du potentiel, il est encore perfectible, il a encore de la marge. C’est de bonne augure pour lui déjà parce que je pense qu’il peut en gardant un bon état d’esprit comme il l’a actuellement il peut aller encore plus loin. Franchir des paliers et faire franchir des paliers à la sélection.
Présent dans le sillage de la sélection nationale depuis 2014, d’abord chez les U20 ensuite chez les A souvent sur le banc et vous décidez de lui offrir sa première titularisation en matche officiel et pas n’importe lequel à domicile et c’est lui qui vous fait gagner le match, Sessi d’Almeida c’est l’illustration du coaching gagnant ou est-ce une bonne étoile ?
C’est les deux. Il y a toujours une bonne étoile sur chaque joueur. Si on lui avait dit qu’il allait marquer, il aura signé des deux mains (rires). Sessi je ne le connaissais pas. Je l’ai découvert à l’occasion des rassemblements et chaque fois il est là. Il a beaucoup d’énergie, il est présent sur les séances d’entraînements, il a un bon état d’esprit. Il a des qualités, quelques fois il est encore un tout petit peu brouillon dans son jeu. Il a un peu de déchets techniques alors qu’il n’y a pas la place pour ça. Mais en tout cas il affiche un gros mental et j’aime cela. Son match était à l’image de ce qu’il est. Beaucoup de générosité, d’engagement. Une alternance de bonnes choses et de moins bonnes. Mais c’est lui quoi. Il faut qu’il régule tout ça, il doit épurer son jeu et gommer ces petits déchets qu’il a par moment.
Le duel des gardiens entre Allagbé vice-capitaine en club et numéro 2 en sélection et Farnolle peu utilisé en club et numéro un chez les Ecureuils, le choix est définitif tant que vous serez en place ?
Je ne peux pas raisonner comme ça. Sur ce poste, il faut que les choses soient bien définies. Dans beaucoup de clubs ou de sélections c’est comme ça. Définir une hiérarchie, un gardien numéro un et un numéro deux jusqu’à ce que la hiérarchie soit bousculée en cas de blessure ou de contre-performance. Pour l’instant c’est comme ça, Fabien a donné satisfaction sur les matches qu’il a eu à disputer. J’ai la chance d’avoir deux bons gardiens. Ce qui n’est pas toujours évident en Afrique. C’est une richesse pour nous. Je suis content d’avoir Saturnin, en plus d’être un très bon gardien a un excellent état d’esprit.
En novembre avant ou après la Gambie, le Bénin va-t-il disputer un amical pour une revue d’effectif ?
Cela me parait un peu court parce que c’est dans un mois. Ce n’est pas trop la finalité. Pour le moment on va vraiment se concentrer sur ce match contre la Gambie. S’il y a des revues d’effectif à faire on le fera un peu plus tard.
A quel type de match vous vous attendez à Banjul, en sachant que les gambiens sont quasiment éliminés à moins que la réserve aboutisse contre le Togo ?
Je ne sais pas déjà il faut voir au niveau de la règlementation est-ce que le dossier a été insuffisamment fait du côté du Togo ? La deuxième chose, à ma connaissance Olufadé a participé au match aller mais pas au retour. A la limite, la Gambie pourrait récupérer deux points.
Si vous devriez analyser, chacun des trois matches disputés par le Bénin sous votre direction pour l’instant ?
Le Togo c’était un derby dans un contexte un peu difficile. Petit stade, terrain synthétique, il fallait qu’on démarre bien qu’on ramène quelque chose de Lomé. Quand on fait la photo du groupe le Togo est un adversaire direct au départ derrière l’Algérie. C’était important de prendre un point chez un adversaire direct pour la qualification, on a fait un match très solide là-bas. On a eu notre moment en seconde période. On aurait pu avoir les trois points. Mais je suis très satisfait du point pris. Le fait de bien résister ne pas concéder beaucoup de choses au Togo, c’est déjà des gages de sécurité pour la suite. En Algérie, je savais qu’on allait jouer un match difficile à Blida. L’ambiance, les gens sont chauds, il y a un nouvel élan avec l’arrivée de Belmadi, des joueurs qui ont envie de se montrer. On savait que ce serait un match délicat pour nous. Je l’ai dit ce que je regrette sur ce match. Dans l’ensemble on a fait un bon match mais ce qui est dommageable c’est de prendre des buts sur phases arrêtées alors que c’est la chose qu’on pouvait plus facilement maîtriser face à cette équipe. Deux buts qu’on doit éviter. Il y a eu des actions où on a été pris de vitesse parce qu’il y a de la qualité en face. On aurait pris un but sur les occasions on aurait dit Ok. Mais là c’est sur des phases arrêtés, ça c’est toujours dommage. Ce corner change la physionomie du match, ça rassure les algériens, ça les mets dans le confort et nous il faut qu’on revienne. Forcément on va offrir un plus d’espace. On se met un plus dans la difficulté.
« J’ai fait cinq CAN et une centaine de matches internationaux, chaque fois on apprend toujours quelque chose »
Alors vous redécouvrez le Bénin, le cadre de vie, l’environnement de travail, vous avez choisi de rester à l’hôtel ?
Je vis comme ça ! Partout où je suis allé en Afrique j’ai toujours vécu comme ça. Ma femme a ses activités en France et moi quand je viens ici c’est beaucoup plus facile et confortable pour moi de rester à l’hôtel.
Entre le retour en Guinée, la Can 2015 puis l’aventure à la tête de la Côte d’ivoire, vous n’êtes plus le même entraîneur ?
Forcément qu’on s’enrichit. On essaye de se bonifier à chaque fois dans les expériences. J’ai fait cinq coupes d’Afrique, une centaine de matches internationaux. Chaque fois on apprend toujours quelque chose de tous les matches, de toutes les phases finales, on en retient quelque chose. Une expérience supplémentaire et j’espère une efficacité accrue. Comme l’énergie et la motivation sont là, il y aura toujours la place pour faire quelques choses.
L’une de vos plus grosses performances en Afrique est la troisième place décrochée avec les locaux ivoiriens lors du Chan 2016 au Rwanda. Vous faites déjà une projection sur le travail à mettre en place avec les joueurs locaux ?
Je vais m’occuper de l’équipe locale. Maintenant, la priorité est pour les A. Pour l’instant il y a pas encore de championnat attendons que ça redémarre. On laisse passer ce match contre la Gambie, après j’aurai le temps de me plonger dans le football local, de suivre les matches de connaitre les joueurs, de commencer à avoir une idée du championnat local. Attendons de voir le calendrier des qualifications du Chan à venir. On est encore loin.
Vous attendez le championnat local pour résider à plein temps au Bénin ou faire les allers-retours pour superviser ceux qui sont en Europe ?
C’est un mix des deux. Je passe beaucoup de temps au pays (Bénin). Je serai parti grosso modo la moitié du temps de mes activités je le passe au pays. Le reste je les passe entre les déplacements de l’équipe A, ceux que je peux faire à droite à gauche pour superviser les joueurs. Je fais ma planification sur l’année, je m’octroi des périodes comme ça en fonction des activités, le championnat local. J’ai besoin par exemple avant le mois de mars de retourner en Europe voir les joueurs. Tout cela je planifie sur une année, quand j’ai toutes les dates.
La composition du staff, le choix Moussa Latoundji comme adjoint ?
Simplement. Il répond aux critères que je recherche par rapport à un entraîneur adjoint.
Lesquels ?
Si possible, un ancien joueur international parce que c’est important quelqu’un qui est connu et reconnu qui a déjà une expérience, un vécu. Et qui peut à l’approche des compétitions être un levier, une aide, un papa ou un grand-frère ou conseiller un tout petit peu. La deuxième chose c’est que c’est un entraîneur local. Je travaille toujours avec des entraîneurs locaux. J’essaye aussi de laisser une trace. Si je peux former quelqu’un ou aider quelqu’un à s’enrichir. Cela a été le cas avec Oumar Tchomogo en son temps. Parce que c’est moi qui lui avait mis le pied à l’étrier lors de la Can 2010 en le prenant comme deuxième adjoint puisque je travaillais avec Fortuné Glèlè.
Pas mal de rumeurs ont circulé sur la durée de votre contrat, un ou trois ans ?
Je pense être claire. C’est un contrat de trois ans avec une étape intermédiaire qui est celle de la qualification à la Can 2019. Chacun appréciera.
« On leur demande d’être performant, mettons du sérieux autour d’eux pour qu’ils ressentent la même chose. »
On a presque oublié que vous étiez sélectionneur des Ecureuils lors de l’un des épisodes les plus sombres du foot béninois en février 2010 avec la dissolution de la sélection béninoise après la Can mais vous avez accepté revenir huit ans plus tard sans rancœur, le retour était facile ?
Personne ne m’a obligé à revenir. Si je suis revenu c’est parce que j’avais envie de le faire. J’étais très déçu de la façon dont les choses ont évolué à l’époque et cette dissolution que j’ai trouvée complètement injuste. Maintenant ce n’était pas une majorité, j’étais bien ici au Bénin. Les gens reconnaissaient mon travail, l’appréciait. Je vivais bien ici. Je me voyais continuer. J’étais à l’aise. Et puis cette dissolution est arrivée. De la déception ? Oui. De la rancœur ? Non. Parce que partout où je suis passé par la suite. Chaque fois que je croisais des béninois il venait me saluer, ils étaient contents. Ils avaient apprécié mon passage. Je n’ai aucune rancœur. Pour une immense majorité des gens j’étais très bien. C’était un plaisir pour moi de revenir au pays et d’essayer de relever ce challenge. Après avoir fait la dernière Can, faire une nouvelle.
Une sorte de revanche sur l’histoire ?
Non. Revanche équivaut avec rancœur et je n’ai pas sentiments négatifs. Il y a juste de se dire que je suis là. On redémarre quelque chose. Il y a un bon groupe, un bon timing pour faire quelque chose de bien quoi.
Après votre départ de la Côte d’ivoire en février 2017, comment s’est fait votre arrivée au Bénin dans les coulisses. ?
Les contacts se sont noués petit à petit. J’ai eu l’occasion d’avoir un échange avec le ministre des sports, Oswald Homeky on s’est rencontré en mai à Paris, on a eu une bonne discussion et le courant est bien passé. Il est ambitieux, pragmatique, il sait travailler se projeter dans le temps. Si il y a des efforts à faire, il peut accompagner c’est ce qu’il a fait d’ailleurs. . Avec le président Moucharafou Anjorin , on se connait depuis longtemps. J’ai déposé mon dossier lors de l’appel à candidature. Il a eu la confiance de placer mon nom dans la shorlist et je l’en remercie J’avais pris des informations sur l’environnement je savais qu’il y avait un bon groupe de joueurs. Il y avait une bonne énergie dans ce groupe. Il demandait juste à être accompagné.
Au Bénin on fait face régulièrement aux problèmes liés à l’organisation autour de la sélection, problèmes de primes, de plan vol, sur les deux premiers rassemblements tout semble parfait jusqu’ici donc…
Nous sommes sur la bonne voie. Pas de problèmes de primes, de transports, de billets d’avion. J’essaye de m’impliquer au maximum. Faut éviter tous ces couacs ou désagréments qui arrivent pendant la semaine de stage et qui sont préjudiciables à la performance des joueurs. Donc faisons en sorte que tout soit carré que les joueurs ne se concentrent que sur le match qu’ils ont à jouer. Qu’il y a rien qui vienne polluer leur tête. Qu’il garde leur motivation intacte. Il y en a de la motivation, les joueurs que j’ai rencontrés sont très motivés pour se qualifier. Donc il faut entretenir cela en mettant autour d’eux du sérieux. On leur demande d’être performant, mettons du sérieux autour d’eux pour qu’ils ressentent la même chose.
« Parce qu’entre le niveau du football local et le niveau international. La marche est énorme. Les gens ne mesurent pas cela. »
On va terminer avec un nouveau quizz, pouvez nous en dire plus sur les cas des joueurs suivants, Rudy Gestede ?
Je l’ai eu. On a échangé. Il m’a expliqué un peu ses raisons. C’est son choix il faut le respecter.
Donc il n’y a pas d’espoir qu’il revienne ?
Je pense qu’aujourd’hui s’il change d’avis il pourra me contacter.
Djiman Koukou ?
Il a retrouvé un club, c’est bien. Il redevient éligible. Ça tombe bien parce qu’il est dans un secteur de jeu où on est plutôt à la recherche. J’espère qu’il va vite retrouver ses sensations parce qu’il n’a pas joué depuis un moment. Faut qu’il enchaîne un peu de temps de jeu.
Frédéric Gounongbé ?
Il est blessé. C’est un garçon qui a beaucoup souffert. Il a beaucoup galéré. Je l’ai appelé aussi pour lui dire qu’on était là. Qu’on ne le laisse pas tomber. C’est des moments très difficiles qu’il traverse. A soigner ses blessures, il est en Belgique actuellement. Sa priorité était qu’il retrouve la totalité de ses moyens physiques avant qu’il retrouve un club et son meilleur niveau. Tout le discours que j’ai eu avec lui c’était surtout un discours d’encouragements. Je suis passé aussi par ces étapes je sais qu’on est seul dans ces moments, de savoir qu’il y a des gens qui sont là derrière.
Il y a une dizaine d’années carrément vous avez lancé, Junior Salomon, Sidoine Oussou, Mouftaou Adou en sélection A alors qu’ils étaient des joueurs locaux, vous comptez faire de même avec la nouvelle vague qui pourrait se révéler lors de la prochaine saison ?
On verra. Je ne peux pas dire à l’avance qu’il y aura des joueurs locaux. Ça va dépendre déjà du potentiel du joueur. J’ai toujours eu à lancer quelques joueurs locaux comme ça. Quand on les lance ils deviennent expatriés très vite. On dit ouais il n’y a pas de joueurs locaux, il y en avait il y a quelques mois. Dès qu’ils font un match international, ils disparaissent du pays. Je regarde toujours le football local. Le fait d’être entraîneur des locaux, on va avoir des regroupements, on va travailler ensemble. De les avoir au quotidien ensemble, de travailler en profondeur. Ça va me permettre de bien les connaitre et cibler les potentiels qu’il y a. Parce qu’entre le niveau du football local et le niveau international. La marche est énorme. Les gens ne mesurent pas cela. Quand ils voient le championnat local. Il voit un joueur ressortir, ils pensent que c’est le même contexte. Non, ce n’est pas le même contexte. Le joueur qui s’exprime parmi les locaux il va falloir qu’il ait le potentiel pour franchir un palier qui est énorme. La marge est grande, il faut vraiment cibler les joueurs.
La danse sur la table dans le vestiaire
Je n’ai pas revu les images, je redoute (il éclate de rires en voyant les images sur mon téléphone)
Entretien réalisé par Géraud Viwami
Making Of
Lieu : Benin MARINA hotel au bord de piscine
Durée : 53 minutes
Boissons : Un café pour le sélectionneur et un jus d’ananas pour le journaliste
Habillement du sélectionneur : T shirt gris, jean, chaussettes blanches, Tongue
Temps additionnels : environ une heure à parler de foot