Les performances ou tout au moins la présence dans le dernier carré sont un exploit réussi par quelques trop rares équipes d’Afrique noire. Les victoires finales sont de 4 pour les pays Sub-sahariens contre 6 pour les pays du Nord. Les clubs ayant atteint le dernier carré sont Coton sport, Heartland, Kano Pillars (1 demi-finale chacun), Asec (2), Enyimba (3) et Tp Mazembé (3). En face, on retrouve Al Ahly (6 demi-finales), l’Espérance de Tunis (4) et l’ Etoile du Sahel (4). La comparaison n’est plus à faire. Les clubs du Nord sont présents au faîte du football africain avec une régularité de métronomes, et, souvent, ce sont les mêmes que l’on retrouve dans le quatuor de tête alors que ceux du Sud changent souvent. Plusieurs facteurs expliquent cet état de fait : les infrastructures, le mode de fonctionnement et de gestion des clubs et les mécanismes de financement.
Peut-on comparer deux mondes différents ? Où des clubs sont gérés comme des sociétés, et d’autres, dans la plupart des cas, sont dirigés comme des associations où le vent m’emporte ? C’est bien difficile. La qualité des infrastructures peut permettre aux équipes du Nord de retenir plus longtemps leurs meilleurs éléments. Ceci explique en partie leur régularité au plus haut niveau national et donc continental. Pour investir dans les infrastructures, il faut avoir des moyens financiers importants et bien gérés. Sur le premier aspect, il suffit juste de suivre un match de championnat à la télé pour comprendre l’écart entre le Nord et le Sud. Les panneaux publicitaires et les sponsors maillots sont des dizaines en Algérie, en Egypte, en Tunisie ou encore au Maroc. Dans les championnats d’Afrique noire, le sponsoring et le financement sont deux handicaps majeurs.
Les grandes entreprises ont encore du mal à consacrer des budgets au sport en Afrique. Même les multinationales ayant des filiales sur le continent. Ceci n’est pas forcément lié à la qualité du football, mais souvent à la fiabilité des compétitions et des responsables. D’autre part, les marchés locaux africains sont trop exigus pour qu’un annonceur rentabilise son investissement dans le sport subsaharien, et la santé économique en général des pays explique la tiédeur des opérateurs économiques. L’exemple à suivre reste le championnat sud-africain qui mobilise autant de moyens que les plus grands d’Europe alors que les clubs sud-africains ne sont pas les meilleurs du continent. Le lien entre le tissu économique et les ressources captées par le football est tangible, même si les clubs ivoiriens ou encore nigérians ne mobilisent pas des ressources proportionnellement aux tissus économiques de leurs pays respectifs.
Le manque de ressources financières n’explique pourtant pas tout. La mauvaise gestion des retombées du succès n’est pas indifférente à toutes les hésitations.
La dernière apparition d’Enyimba à une demi-finale remonte à 2008, celles de l’ASEC Mimosas sont, hélas, plus épisodiques encore. De gros efforts restent encore à fournir pour bâtir et consolider de vrais projets à long terme en Afrique noire. Le club nigérian de l’Etat d’Aba et son gouverneur ambitieux se sont comme évanouis après deux sacres de rang dans la Ligue des champions. On pensait à une nouvelle puissance du football africain, mais hélas il a fallu déchanter.
Enfin, la question de l’exode des joueurs de l’Afrique noire, largement moins bien payés que leurs collègues du Nord, est la plaie majeure du football africain. Les talents non confirmés s’en vont pour des aventures sans suite, laissant leurs clubs contraints à un éternel recommencement.
Sur les 10 dernières années, les Congolais du TP Mazembé et les Nigérians d’Enyimba restent les seuls d’Afrique noire à avoir pris part à 3 demi-finales et remporté 2 titres. Les premiers ont su conserver leurs meilleurs éléments. Maintenant, il en faudra plus pour montrer que quelque chose a vraiment changé et que l’Afrique Noire peut être mieux qu’ensemble voué à un rôle d’outsider. Pour équilibrer les débats sur le continent, entre le Nord et le Sud, il faudra faire preuve de rigueur dans la gestion et la programmation du football au Sud du Sahara. C’est le prix à payer.
Aubay